Qui sont les acteurs impliqués dans la lutte contre la congestion du trafic ? 

La liste n’est pas exhaustive, mais au premier rang figurent les autorités publiques urbaines et centrales compétentes en matière de transports.

Compte tenu de sa double qualité de Capitale du pays et de Ville-Province, Kinshasa appelle des concertations d’harmonisation se rapportant aux initiatives des différentes autorités : les sauts-de-mouton et l’idée de projet d’une nouvelle ville de Kinshasa émise récemment au Ministère de l’urbanisme sont là deux exemples dans lesquels nous espérons que des échanges avant-chantier aient eu lieu, compte tenu d’un cadre conceptuel qui préexistait (le SOSAK).

Ce dernier a certes déjà le mérite d’exister, mais il faut se préoccuper de sa mise en œuvre, qui ne devrait pas attendre les seuls financements extérieurs. Notons aussi que son appropriation par la population kinoise nécessite qu’il lui soit communiqué et expliqué, au lieu de rester un document d’experts et de politiques. Du fait d’une communication pertinente, chaque concitoyen devrait être mis dans la possibilité de savoir ce auquel il devra s’attendre au fur et à mesure de la réalisation des plans, et quelle contribution va-t-il devoir offrir.

Quel est le rôle de ces acteurs ?

L’autorité urbaine

L’autorité devra recourir aux médias et à tous autres moyens pour communiquer, susciter l’adhésion de la population, et faire en sorte qu’un changement de mentalité puisse être favorable à la mobilité de tous en ce qui concerne le respect du bien public, les règles de sécurité routière, les droits et devoirs des usagers de transports publics.

Elle doit aussi, de manière particulière :

  • Veiller à la qualité de l’offre publique du transport en commun et tirer l’ensemble de l’offre vers le haut, ce qui se fera notamment par un suivi de près des établissements publics de transport (Transco, New Transkin), et qui influera aussi favorablement sur l’ensemble des opérateurs privés du secteur,
  • Travailler sur les comportements sociaux et psychologiques, et le professionnalisme des agents intervenant sur la voie publique (policiers, agents des services de transport…), tout en leur octroyant les moyens décents d’intervention, assortis toutefois d’un dispositif de suivi et de sanctions,
  • Fournir directement ou par mandat des services, infrastructures et équipements dans des conditions exemptes de corruption et suivant les standards universellement observés (permis de conduire plus sûrs, contrôle technique non-complaisant, travaux d’aménagement, d’entretien et de réparation exécutés suivant le cahier des charges, signalisations non équivoques…)

Enfin, il est heureux que l’autorité urbaine ait placé la question des transports dans la dynamique globale de l’aménagement urbain. Cependant, compte tenu de l’évolution rapide des technologies de la mobilité, il passe pour souhaitable de mettre en route un mécanisme de veille sur les alternatives possibles à celles existantes au moment de l’adoption du SOSAK et du PDTK, et susceptibles de donner à la ville les solutions les plus efficaces, économiques et vertueuses sur le plan environnemental.

La police

Viennent ensuite les forces de police, tout particulièrement la Police de circulation routière.

Du fait de ces missions, cet organisme devrait aussi, à l’avenir, être mis à contribution pour formuler des avis aux autorités compétentes en matière de mobilité et de sécurité routière et, dans l’hypothèse favorable de l’amélioration nette du comportement des usagers de la route et du développement technologique (robots régulateurs de circulation, caméras de surveillance…). Elle ne devrait réguler la circulation qu’en cas de perturbations importantes et inopinées de la mobilité.

L’omniprésence dans les carrefours de la pléthore d’agents commis à l’encadrement de la circulation routière est un aveu de l’existence des insuffisances et dysfonctionnements, renforçant la congestion des routes. Elle laisse planer un doute sur la maîtrise du travail à faire et surtout, met en évidence le souci de la recherche des « soubassements ». C’est-à-dire les espèces sonnantes, pour appuyer le « rapport de la journée » attendu par la hiérarchie et faute duquel l’agent commis au carrefour juteux serait rappelé au bureau, perdant ainsi tout contact avec les conducteurs-clients.

Après la satisfaction de la hiérarchie, l’agent de roulage « roule » aussi pour son propre compte et lorsque ses prétentions, en même temps que celles de ses collègues, deviennent excessives aux yeux des conducteurs et des associations qui les défendent, l’autorité compétente, au fait de cette situation, mais impuissante quant à doter la police des moyens suffisants d’action, calme la tension en décrétant quelques jours de « courtoisie », à entendre comme une sorte de trêve pendant laquelle, sauf situation de gravité, les agents PCR sont appelés à laisser les véhicules circuler sans être contrôlés ! On est donc bien loin de la notion de courtoisie sous d’autres cieux, qui s’applique plutôt dans les relations entre les usagers de la route.

Ce qui précède illustre assez bien les difficultés à franchir pour que la Police fasse le job attendu. Il faudra bien une mise à niveau, de l’éducation civique et l’octroi de moyens suffisants de travail assortis d’un système dissuasif de suivi et de sanctions.

Les services de recouvrement et de contrôle

Ce qui est dit des agents de la police l’est tout autant, mutatis mutandis, à l’égard des services de recouvrement et de contrôle de la Ville de Kinshasa.

Déjà en amont, les règles de délivrance des permis de conduire, du certificat de contrôle technique, de la vignette, de l’autorisation de transport et de stationnement…devraient être rigoureusement appliquées.

La constitution d’une base de données mutualisée et l’échange des informations devraient permettre à ces différents services d’interpeller autrement les redevables et d’obtenir l’exécution de leurs obligations dans un contexte apaisé, au lieu de tous les attendre « au tournant » sur la voie publique. Cette interpellation sur la voie publique devrait rester réservée aux récalcitrants qui seraient contraints de payer de fortes amendes, sans préjudice d’une sanction de mise à l’index qu’il faudra préalablement prévoir.

Les particuliers

Parmi les acteurs importants, figurent aussi les conducteurs, leurs associations et les propriétaires de véhicules de transport.

Un mot a été dit au sujet des chauffeurs à risque et qui, pour la plupart hélas, exercent dans les transports collectifs tenus par des privés (bus, taxi-bus, taxi, moto-taxi, triporteurs…) et dont le comportement sur la route est des plus inquiétants : dépassements risqués, freinages et accélérations brusques, non-respect des règles de circulation, relations équivoques avec les policiers… ce qui n’aide pas à améliorer la congestion des routes kinoises.

Des actions mises en place contre la congestion des routes

Une procédure rigoureuse de délivrance du permis de conduire aura eu raison de beaucoup d’entre eux, tandis que l’adoption d’un processus professionnel pertinent de recrutement par les propriétaires de véhicules de transport, aura tôt fait d’engager des conducteurs consciencieux sur la route et pour le bien de la communauté. Des auto-écoles existent, mais il faudra que l’apprenant fasse valider ses connaissances et sa pratique auprès d’un organisme officiel ou agréé d’évaluation composé d’examinateurs à la fois compétents et intègres pour obtenir son permis de conduire. Il sera hautement souhaitable qu’une bonne partie de l’évaluation se déroule par voie numérique.

Pour les conducteurs en activité, une sorte de casier judiciaire électronique renseignant les contraventions et accidents impliquant le conducteur, devrait être tenue. La mise en œuvre de sanction de retrait temporaire ou définitif du permis de conduire seront appliqués pour les cas qui le requièrent. Cette sanction, à notre avis, si elle est suivie de l’effet d’empêchement de conduire, sera bien plus dissuasive que les amendes.

Plus positivement, les propriétaires des véhicules de transport de passagers gagneraient à mettre en place un système d’identification et de motivation de conducteurs vertueux, et à les inciter à de meilleures performances.

Des conducteurs consciencieux et respectueux des règles feront nettement la différence sur la voie publique, et la problématique de la congestion s’en trouvera allégée, améliorant la circulation. Il reste que cela demandera du temps pour ressentir le changement, tant il y aura des conducteurs à former et à sensibiliser à l’écoconduite. Tout ceci devrait être examiné dans la redéfinition de l’accès des transporteurs artisanaux sur la voie publique.

Les passagers

 Ils ont aussi un rôle important dans la réduction de la congestion en :

  • Interpellant le conducteur à adopter les règles de bonne conduite et de sécurité routière,
  • Privilégiant l’adoption des transports collectifs disponibles et le covoiturage plutôt que la voiture individuelle,
  • Choisissant des modes de transport actifs pour les courtes distances.

Les établissements publics de transport en commun

Leur présence et leurs performances sur le marché influent directement sur le comportement des acteurs privés : plus l’offre publique sera importante, régulière et de qualité, moindre seront les égarements décriés plus haut.

Les associations et les médias

Quant aux associations et aux médias, ils devront jouer le rôle de sensibilisation et de dénonciation des anomalies constatées.

Un mot sur les sauts-de-mouton 

Figurant au nombre des travaux des cent premiers jours de la nouvelle Présidence de la République, ces sauts-de-mouton avaient vocation à contribuer à fluidifier le trafic, et non à résorber tous les encombrements, qui sont une préoccupation de longue date. Ils trouvent leur origine dans diverses causes, comme le confirme du reste l’analyse faite dans le cadre du Schéma d’Orientation Stratégique de l’Agglomération Kinoise (SOSAK).

Sur le plan institutionnel, il est à espérer qu’une concertation est lieu entre la Présidence et la Ville de Kinshasa pour que ces sauts-de-mouton, tout en restant une initiative présidentielle, soient intégrés dans le plan directeur des transports de Kinshasa (PDTK) ou tout du moins, créent des dynamiques vertueuses en faveur de la mobilité.

S’agissant des ouvrages exécutés sous trafic, c’est-à-dire alors que la circulation n’est pas interrompue, des études préalables devaient avoir prévu des mesures pour :

  • Indiquer par un plan de signalisation en amont les futurs sites des travaux,
  • Communiquer régulièrement aux usagers le commencement des travaux, afin qu’ils s’habituent à la nouvelle situation et intègrent une autre mentalité de circulation,
  • Prendre en charge les usagers de ces périmètres par des signalisations adéquates ou par la présence permanente des agents de circulation routière,
  • Et surtout, autant que faire se peut, mettre en route des voies de déviation pour fluidifier la circulation afin de juguler la congestion

En conclusion

Les mesures qui n’avaient pas été mises en œuvre auparavant sont en cours et les décaissements nécessaires sont en train d’être effectués. Il y a donc lieu d’espérer voir les nouveaux délais respectés, et la circulation rendue plus fluide une fois ces ouvrages terminés.

Cependant, les heures de pointe n’auront pas cessé et la congestion des routes qui est un phénomène urbain incontournable, nous accompagnera… même en moindre mesure.

Cet article est à présent terminé, notre équipe espère qu’elle aura pu vous délivrer l’état de la question et des pistes de solutions à court terme, ainsi que les efforts attendus des uns et des autres pour atténuer les effets des embouteillages et, in fine, résoudre la congestion des routes kinoises.

Nous vous invitons également à regarder l’article  « En finir avec la congestion sur les routes kinoises ? (1ère partie) » afin de comprendre parfaitement le sujet.

Et nous, on se dit à très vite pour le prochain article !

 

 

L’équipe Digitalco